Un juge menacé au Liban pour refuser de pénaliser l'homosexualité

Mardi 30 mars, le juge Peter Germanos, commissaire du gouvernement près le Tribunal militaire, au Liban, a dépénalisé l’homosexualité, acquittant quatre militaires. Jusqu’à ce jour, l’homosexualité était considérée comme un crime, passible de prison. Pour motiver sa décision, il a affirmé que la loi condamne les « relations contre nature », mais celle-ci ne  précise pas lesquelles. C’est une première dans le monde arabe. Cette décision a été applaudie par les organisations laïques et humanistes. Seulement, depuis, il est accusé par les Oulémas d'incitation à la décadence des mœurs etc. Il est également l’objet d’attaques diffamatoires de la part de journalistes proches de ces milieux (presse, télé). Cela a pris une ampleur d’une très grande envergure, et la situation est très tendue.

Il  est important qu’un tel événement soit soutenu (diffusé) médiatiquement.

Le jour de la décision, l’information a été relayée par la presse anglophone : Daily Star, Al Jazeera, Fox News et New York Times…

Voici quelques liens ainsi que l’article en entier, paru à l’Orient le Jour (presse libanaise francophone), le 5 avril 2019.

https://www.foxnews.com/world/lebanon-rules-homosexual-sex-not-punishable-by-law

https://www.nytimes.com/aponline/2019/04/01/world/middleeast/ap-ml-lebanon-lgbt.html

https://www.lorientlejour.com/article/1164464/le-tribunal-militaire-depenalise-pour-la-premiere-fois-lhomosexualite.html

 

Les ulémas craignent la « colère divine » 

DÉPÉNALISATION DE L’HOMOSEXUALITÉ

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Le Conseil des ulémas musulmans a condamné sur un ton proche de ce qu’a pu être l’Inquisition médiévale la décision du commissaire du gouvernement près le Tribunal militaire le juge Peter Germanos d’acquitter quatre militaires accusés de « relations contre nature » en refusant de délivrer des mandats d’arrêt à leur encontre. Estimant que la loi ne précise pas quelles « relations contre nature » sont condamnables, le juge Germanos a pris en somme une décision qui dépénalise l’homosexualité.

Pour les ulémas, « une telle décision dangereuse est susceptible d’attirer la colère de Dieu ».

Prise dans « des circonstances louches », cette décision « suspecte » exprime « un parti pris pour le vice, encourage la pornographie, arrache à la société ses valeurs morales et religieuses et contribue à pourrir les relations sociales », ont-ils ajouté dans un communiqué.

D’un point de vue juridique, le raisonnement du juge Germanos est « une hérésie puisqu’il existe une loi spéciale, la loi du 6-2-1931 sur la protection de la santé publique face à la prostitution, et qui pénalise explicitement l’homosexualité dans ses articles 68 et 69 », a expliqué le Conseil des ulémas.

C’est sur cette base qu’il a appelé « la partie responsable du juge à révoquer sa décision en appliquant la loi contre les prévenus ». « Que ceux qui gardent jalousement la pureté morale de notre société s’unissent dans leur refus de toute mesure susceptible d’assouplir la manière de traiter avec l’homosexualité et le vice », ont conclu les ulémas.

C’est la première fois que la jurisprudence militaire libanaise s’inscrit dans une tendance à la dépénalisation de relations entretenues entres individus de même sexe. Elle rejoint ainsi un mouvement lancé dans les tribunaux civils dès 2009, avant qu’une juridiction de deuxième degré, la cour d’appel du Mont-Liban présidée par Randa Kfoury, confirme le 12 juillet dernier la décision d’un juge pénal (Rabih Maalouf) de ne pas sanctionner l’homosexualité, décrétant que celle-ci ne constitue pas un crime lorsqu’elle se pratique en privé.

Par Roland Gori, à lire dans Libération