Pétition "Pas de bébé à la consigne"

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Depuis 50 ans, les bonnes fées de la psychologie, de la sociologie, de la pédagogie, et même celle de l’économie, se sont penchées sur le berceau des tout-petits, fondant au fil du temps un nouveau champ de connaissances sur les enjeux de l'accueil des jeunes enfants. Ainsi sont aujourd'hui mieux définies les exigences de qualité pour l’accueil des bébés. Les recherches en France et à l'international convergent sur ces critères de qualité : niveaux de qualifications professionnelles, taux d’encadrement, taille restreinte des groupes d’enfants, temps et disponibilité accordés à l’enfant et sa famille, ainsi que temps de réflexion sur les pratiques qui favorisent une prise en compte de l’enfant et de sa famille dans une relation individualisée. Les progrès réalisés depuis les années soixante s'appuyaient donc sur ce qui semblait faire enfin consensus : faciliter l'articulation entre vie familiale et vie professionnelle pour les parents, tout en accueillant les bébés de façon personnalisante en crèche ou chez une assistante maternelle. Mais les décisions prises au début des années 2010, entamant une à une les avancées précédentes, ont acté que ces fondements n'étaient plus partagés par les pouvoirs publics, qui traçaient alors la perspective que plus d’enfants soient accueillis par des professionnels souvent moins bien qualifiés. C'est-à-dire plus de stress, moins de disponibilité et d’attention du côté des professionnels se traduisant par plus d’insécurité matérielle et affective pour chaque enfant. Après avoir pris l'engagement de revenir sur les mesures les plus préjudiciables au bon accueil des tout-petits (comme le surbooking des bébés et la moindre qualification globale des équipes), en abrogeant notamment le décret "Morano", l’équipe gouvernementale d'après 2012 n'a pas donné suite. Les maisons d’assistantes maternelles dérogent toujours à des normes minimales légales de fonctionnement. De même qu'un plan "métiers de la petite enfance", ayant pour cœur une hausse globale du nombre et des qualifications des professionnels de la petite enfance et incluant de vraies mesures de promotion professionnelle pour les métiers aux formations les plus courtes et les moins qualifiantes, tarde à voir le jour. Enfin, par une disposition passée inaperçue de la loi dite "Macron" sur l'attribution de contrats de concessions, les modes d’accueil collectifs risquent d’être confirmés demain dans le champ de la directive européenne "services" et soumis aux règles de la concurrence, avec pour effets moins de réglementation protectrice et moins de financements publics. Nous ne nous résignons pas à une telle situation. Créer massivement de nouvelles places dans des modes d'accueil de qualité, ce n'est pas répondre aux sirènes économistes de "l'investissement social", c'est faire œuvre de considération pour l'humanité, la dignité et les droits des tout-petits et de leurs parents, c'est faire société autour des principes de justice sociale et de solidarité dès la prime enfance.

 

Par Roland Gori, à lire dans Libération