L'art comme principe actif (Pour Cassandre / Horschamp), par Nicolas Roméas.

Cassandre

Il existe dans le monde francophone une publication qui, depuis plus de dix-sept ans, traite exclusivement des relations entre ce que l'on nomme le geste artistique et la réalité politique des sociétés contemporaines. Elle le fait autant en termes de pensée que d'action, en s'efforçant de montrer l'importance et la valeur de pratiques peu spectaculaires mais essentielles, qui souvent s'inventent ou prennent place dans des lieux de relégation.

Cette revue combative et exploratrice répond au nom de Cassandre/Horschamp.

Francis Jeanson, Arthur Miller, Giorgio Strehler, Jean Duvignaud, Hubert Gignoux, Pierre Bourdieu, Édouard Glissant, Danielle Mitterrand, Philippe Avron, Jean Oury, Elias Khoury, Alain Rey, Armand Gatti, Tony Gatlif, Rodrigo Garcia, Aminata Traoré, Edward Bond, Maguy Marin, Patrick Chamoiseau, Yves Clot, René Scherer, Florence Dupont, Albert Jacquard, Régis Debray, Robin Orlyn, Jean Jourdheuil, La Ribot, Peter Schumann, Ariane Mnouchkine, Henri Bauchau, Jack Ralite, Fernando Arrabal, Jean-Paul Wenzel, Josette Baïz, Jo Ann Endicott, Christian Boltanski, Jean-Paul Wenzel, Emmanuelle Laborit, Fadhel Jaïbi, Benjamin Stora, Robert Abirached, Paul Jorion, Annie Lebrun, Nicolas Klotz et Élisabeth Perceval, Pierre Rabhi, Paul Ariès, Olivier Perrier, Serge Pey, Monique et Michel Pinçon-Charlot, Breyten Breytenbach, Raoul Vaneigem, Peter Brook et de nombreux autres, largement reconnus ou moins visibles mais extrêmement actifs, s'y sont exprimés depuis 1995.

On ne peut évidemment pas les citer tous ici, mais, plus récemment, un certain nombre d'autres acteurs ou militants culturels, artistes et chercheurs marquants de notre époque  - en philosophie, histoire, économie, psychanalyse, sociologie ou anthropologie -, parmi lesquels nos premiers membres d'honneur (indiqués en bas de ce texte), y ont trouvé un porte-voix en direction des fervents défenseurs d'un art relié à la collectivité humaine.

Depuis quelques années, son lectorat s'est ouvert à ceux, de plus en plus nombreux, qui considèrent que pour l'essentiel de ce qui constitue nos existences, la valeur symbolique (au sens fort de ce mot) doit l'emporter sur les cotations marchandes et autres évaluations quantitatives. C'est le combat auquel nous nous attachons.

Ce combat de civilisation rappelle celui que menèrent en leur temps les pionniers de l'écologie qui eurent tant de mal à être entendus et ne le furent qu'à la «faveur» d'un certain nombre de catastrophes et de menaces sur notre environnement naturel - et au prix d'une opiniâtreté sans faille. Mais les catastrophes et les menaces qui planent actuellement sur nos sociétés touchent directement l'être humain. C'est ce dont il a toujours été question dans cette revue : la défense de ces outils symboliques qui servent à créer des langages pour la construction de l'humain, que le système néolibéral cherche par tous les moyens à affaiblir ou à détruire. Il n'y a pas aujourd'hui dans le monde francophone d'autre publication exclusivement consacrée à ce sujet que nous considérons comme brûlant dans la période très inquiétante que nous traversons. Ce n'est peut-être pas exactement le moment qu'elle disparaisse.

Mais le paradoxe de l'époque n'est plus à démontrer : plus la marchandisation générale s'accélère dans nos sociétés, plus les outils culturels qui permettent de lutter contre ce phénomène deviennent indispensables et plus on assiste à l'amenuisement de leurs possibilités d'existence.

Pour ce qui concerne les publications de ce type, qui n'ont aucune vocation mercantile, les problèmes de visibilité et de diffusion sont évidemment cruciaux. Comment faire pour être visible lorsqu'on se refuse à la tyrannie du vedettariat et, surtout, lorsqu'on ne dispose pas des moyens de passer par les gros diffuseurs centralisés qui exigent des quantités démesurées d'exemplaires imprimés, ruineuses pour des structures non-commerciales ?

C'est le problème majeur que nous rencontrons.
Et, comme d'autres, nous n'avons pas trouvé la réponse, parce qu'aujourd'hui cette réponse n'existe pas.

Notre situation financière ne nous permettant pas de continuer sans soutiens accrus, le moment est donc venu de poser publiquement la question. Avant de nous résoudre à saborder cette frêle et précieuse embarcation construite en novembre 1995, il nous reste à essayer de savoir s'il existe dans ce pays - et peut-être ailleurs dans le monde - suffisamment de volontés actives de soutenir un travail de valorisation des actions artistiques peu visibles, en lien avec les préoccupations des peuples. En un mot, un espace de défense du symbolique face aux écrasantes armées du chiffre en marche dans le monde, qui nous menacent à moyen terme d'une déshumanisation de l'humain.

Alors il faut nous adresser à vous.

C'est ce que nous faisons aujourd'hui avec la création de l'Association des amis de Cassandre/Horschamp. Le président d'honneur en est Stéphane Hessel. Et vous trouverez à la suite de ce texte les noms des premiers membres d'honneur. Si vous pensez que la cause en vaut la peine, adhérez, à votre mesure, selon vos moyens et votre motivation. Les membres de cette association seront régulièrement convoqués pour donner leur avis sur les thèmes et orientations de la revue et participer à nos futures Agoras des Hors-champs de l'art.

Si une volonté suffisamment forte de nous permettre de continuer ces activités de publications et de rencontres se manifeste, nous poursuivrons avec joie ce chemin et ce combat.


Merci à vous.

Adhésion et soutiens : www.horschamp.org/spip.php?article4039


Association des amis de Cassandre/Horschamp

(Adch [at] horschamp.org)

Président d'honneur Stéphane Hessel

Président Nicolas Frize (compositeur, musicien, auteur)

 



Premiers membres d'honneur à ce jour



Roland Gori, Professeur de psychopathologie clinique, initiateur de l'Appel des appels, psychanalyste, auteur, philosophe.

Marie-José Mondzain, Directrice de recherche au CNRS, philosophe, directrice de recherche à l'EHESS.


Robin Renucci, Comédien, directeur des Tréteaux de France et de l'Aria.


Bernard Stiegler, Directeur de l'Institut de recherche et d'innovation (IRI), fondateur de  Ars Industrialis (Association internationale pour une politique industrielle des technologies de l'esprit), philosophe.

Patrick Bouchain, Architecte, inventeur, pionnier du réaménagement de lieux industriels en espaces culturels.

Thierry Pariente, Directeur de l'ENSATT à Lyon.

Armand Gatti, Poète, dramaturge, cinéaste, écrivain.

Olivier Neveux, Professeur d'histoire et d'esthétique du théâtre - Université Lyon 2.

Emmanuel Wallon, Professeur de sociologie politique - Université Paris X - Nanterre.

Charles Silvestre, Auteur, journaliste, secrétaire général des Amis de l'Humanité.

Annie Collovald, Professeur de sociologie à l'Université de Nantes, directrice du CENS.

Jean-Claude Amara, Chanteur, musicien, co-fondateur de Droit au Logement et de Droits Devant !!!

Julien Blaine, Poète, éditeur, fondateur entre autres de la revue internationale Doc(k)s, des rencontres internationales de poésie de Tarascon, du Centre international de Poésie de Marseille.

Sylvie Crossman, Co-fondatrice et directrice de Indigène éditions.

Mohamed Rouabhi, Acteur, metteur en scène, auteur (Cie les Acharnés).

Bernard Lubat, Musicien, amusicien, parleur, inventeur d'Uzeste musical.

Christian Jehanin, Comédien, metteur en scène, fondateur et directeur de l'EDT 91.

Laurent Grisel, Poète, écrivain, chercheur.

Jean-François Labouverie, Écrivain, co-fondateur de l'International Visual Theater.

Fabrice Lévy-Hadida, Compagnie Les mille et une vies (Lille).

Marc Lacreuse, Collectif Éducation populaire et transformation sociale.

William Petit, Danseur, chorégraphe (Compagnie Rialto fabrik/nomade).

Emmanuel Éthis, Président de l'Université d'Avignon.

 

Par Roland Gori, à lire dans Libération