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Chère amie, cher ami
Lors de la discussion au Sénat du projet de loi concernant le financement de la Sécurité Sociale pour 2026, onze sénateurs et sénatrices (*) ont déposé un amendement concernant le remboursement des thérapies " se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques" : il s'agit de cesser tout remboursement.
Vous trouverez ci-dessous le texte de l'amendement tel qu'il apparait sur le site du Sénat. Vient ensuite le texte d'une pétition lancée par le Syndicat national des psychologues. Intitulée
Non à l'amendement 159, oui à la pluralité des approches !
elle recueille maintenant plus de 70 000 signatures. On peut la signer en allant sur le site change.org
(*) Le texte initial a été déposé par quatre personnes rejointes ensuite par sept élu(e)s.
Liste des sénateurs et sénatrices :
Jocelyn Guidez : sénatrice Union des Centres, artiste, organisatrice de spectacles
Sylvie Vermeillet : parti Radical, vice-présidente du sénat, comptable, féministe
Michel Canevet : sénateur démocrate et indépendant, école de commerce, écologiste, Annik Jaquemet : sénatrice Union des Indépendants, vétérinaire, féministe, Olivier Henno : sénateur Union des centres , cadre commercial, Brigitte Bourguignon : Union des centres, secrétaire médicale, Vincent Delaye, Union des démocrates et Parti radical, expert aux comptes, Franck Dhersin, Union des centres, juriste d’entreprise, Nadia Sollogub, UC, mère au foyer, Jocelyne Antoine, UC, comptable, féministe, Anne-Catherine Loisier, UC gestionnaire de forêts.
Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2026 (1ère lecture)
(n° 122 , 131 , 126) Amendement N° 159 rect. sexies
AMENDEMENT présenté par Mmes GUIDEZ, VERMEILLET et JACQUEMET, MM. DELAHAYE et DHERSIN, Mmes SOLLOGOUB, BOURGUIGNON, ANTOINE, LOISIER, PERROT et BILLON et MM. HINGRAY et BLEUNVEN
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 18 (SUPPRIMÉ)
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À compter du 1er janvier 2026, les soins, actes et prestations se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques ne donnent plus lieu à remboursement, ni à participation financière de l’assurance maladie.
II. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.
Objet
Cet amendement vise à garantir la cohérence scientifique et l’efficience des dépenses de l’assurance maladie.
Les soins fondés sur la psychanalyse, en particulier lorsqu’ils s’appliquent aux troubles du neuro-développement, aux troubles anxieux ou dépressifs et aux affections psychiatriques chroniques, ne disposent aujourd’hui d’aucune validation scientifique ni d’évaluation positive du service médical rendu par la Haute Autorité de santé. Plusieurs rapports publics ont souligné l’absence de preuves d’efficacité et le caractère inadapté, voire contre-productif, de ces approches, qui sont à différencier de psychothérapies.
Dans un contexte budgétaire contraint, il est légitime que la solidarité nationale concentre son effort sur les prises en charge dont l’efficacité est démontrée et évaluée. Cet amendement ne remet pas en cause la liberté de choix des patients ni la liberté de pratique des professionnels. Il se borne à mettre fin au financement public de la pratique, quels que soient les dispositifs de financement : Mon Soutien Psy, centres médico-psychologiques, etc.
En recentrant la dépense d’assurance maladie sur les soins ayant un bénéfice médical avéré, il s’agit de favoriser la diffusion de pratiques thérapeutiques recommandées par la Haute Autorité de santé, notamment les approches comportementales, éducatives et de réhabilitation psychosociale.
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Pétition lancée par le SNP
Non à l'amendement 159, oui à la pluralité des approches !
Le problème
Amendement 159 : vers une psychothérapie d’État ?
Les attaques contre la pluralité des approches pour les soins psychiques ne sont pas nouvelles. Il y a un mois à peine, près de quatorze organisations de psychologues et de psychiatres publiaient un communiqué commun dénonçant les déclarations du président de la Haute Autorité de Santé (HAS) évoquant la possibilité de rendre opposables certaines recommandations cliniques.
Le SNP a également mentionné dans de nombreux communiqués le fait que le dispositif Mon Soutien Psy était une première étape pour contraindre les psychologues et que la suite impliquerait la mise au pas théorique et méthodologique de la profession. Cette hypothèse politique est en train de se réaliser en direct. En effet, l’idéologie défendue par le ministère est poreuse et se retrouve désormais dans les propositions de certains parlementaires.
Un amendement d’une extrême gravité pour le soin
L’amendement n°159 au PLFSS, déposé au Sénat par les sénatrices GUIDEZ, VERMEILLET, JACQUEMET et le sénateur CANÉVET, en fournit une démonstration flagrante. Adopté en commission, il sera débattu en séance publique courant novembre.
Cet amendement propose d’interdire, à compter du 1er janvier 2026, tout financement public des soins, actes et prestations se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques, et ce quel que soit le dispositif : CMP, Mon Soutien Psy, établissements médico-sociaux, exercice libéral…
Ce sont ainsi des milliers de professionnels, psychologues comme psychiatres, et des milliers, voire des millions de patients qui pourraient être directement concernés.
Une décision idéologique, non fondée scientifiquement.
Cet amendement, rédigé sans concertation avec les professionnels ni connaissance de la clinique et du travail de terrain, établit une sélection arbitraire des méthodes pouvant bénéficier de fonds publics.
Il n’est pas fondé sur des études scientifiques robustes, mais bien sur une idéologie néo-libérale qui consiste à rechercher en permanence à réduire le soins à une suite d’indicateurs qui puissent faire l’objet d’économies. Les économies vont donc se faire sur le dos des professionnels et des patients.
Ce projet manifeste une confusion persistante entre psychologues et professionnels du champ médical, en invoquant un « bénéfice médical avéré » totalement incohérent avec le statut et les missions des psychologues. Pour rappel, les psychologues, n'étant pas dans le code de la santé publique, ne sont ni des médicaux et encore moins des paramédicaux.
Une lecture erronée du soin psychique
Réduire la qualité d’une prise en charge à la seule orientation théorique va à l’encontre des résultats les plus solides de la recherche : la relation thérapeutique étant considérée comme le facteur prédictif majeur d’efficacité, quelle que soit l’approche.
L’invocation systématique et incantatoire des recommandations de la HAS montre une méconnaissance profonde des réalités du soin psychique. Les prises en charge en psychologie ne peuvent être standardisées comme des actes de médecine somatique : la complexité du psychisme, la singularité des personnes et la diversité des situations cliniques rendent impossible une normalisation des méthodes.
La pluralité des approches est une composante essentielle du soin psychique et fait justement partie du travail du psychologue qui peut, dans le cadre de son autonomie professionnelle, évaluer l’intérêt de recourir à telle ou telle méthode.
Une attaque politique inacceptable
Il appartient aux parlementaires de faire la loi, mais il appartient aux professionnels du soin de déterminer les méthodes pertinentes dans leur champ. Il est important de respecter la place de chacun. Proposer un amendement d’une telle portée sans consulter les organisations professionnelles est inacceptable et rend compte d’une tentative de légiférer en catimini qui est d’autant plus sidérante.
Le syndicat appelle les sénateurs à rejeter l’amendement 159
Nous appelons les sénateurs à ne pas créer une psychothérapie d’État pour des motifs idéologiques, loin de la science, loin du terrain, loin de la pratique clinique et ainsi à voter contre cet amendement en séance publique et à ne pas le retenir dans le cadre d’une éventuelle commission mixte paritaire.
Pour défendre la pluralité des pratiques et refuser toute dérive vers une psychothérapie d’État, dites NON à l'amendement 159 !
Par Roland Gori, à lire dans Libération
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